Dictionnaire des idées reçues
A
ABELARD : Inutile d’avoir la moindre idée de sa philosophie, ni même de connaître le titre de ses ouvrages. Faire une allusion discrète à la mutilation opérée sur lui par Fulbert. Tombeau d’Eloïse et d’Abélard : si l’on vous prouve qu’il est faux, s’écrier : « Vous m’ôtez mes illusions. »
ABRICOTS : Nous n’en aurons pas encore cette année.
ABSALON : S’il eût porté perruque, Joab n’aurait pu le tuer. Nom facétieux à donner à un ami chauve.
ABSINTHE : Poison extra-violent : un verre et vous êtes mort. Les journalistes en boivent pendant qu’ils écrivent leurs articles. A tué plus de soldats que les Bédouins.
ACADÉMIE FRANCAISE : La dénigrer, mais tâcher d’en faire partie si on peut.
ACCIDENT : Toujours déplorable ou fâcheux (comme si on devait jamais trouver un malheur une chose réjouissante… ).
ACCOUCHEMENT : Mot à éviter ; le remplacer par événement. « Pour quelle époque attendez-vous l’événement ? »
ACHILLE : Ajouter « aux pieds légers » ; cela donne à croire qu’on a lu Homère.
ACTRICES : La perte des fils de famille. Sont d’une lubricité effrayante, se livrent à des orgies, avalent des millions, finissent à l’hôpital. Pardon ! il y en a qui sont bonnes mères de famille !
ADIEUX : Mettre des larmes dans sa voix en parlant des adieux de Fontainebleau.[...]
Gustave Flaubert - Гюстав Флобер - جوستاف فلوبير